D’αἰὡν à aeternitas : le transfert de la notion d’éternité chez Cicéron

   

Sabine Luciani

 

Dans la notice aeuum du Dictionnaire étymologique de la langue latine[1], A. Ernout et A. Meillet proposent d’attribuer l’invention du substantif latin aeternitas à Cicéron[2]. Cette hypothèse, fondée en partie sur le fait que les premières occurrences figurent chez cet auteur, est fort stimulante. En étudiant les emplois du terme dans la littérature latine, on s’aperçoit en effet que Cicéron est non seulement le premier, mais aussi le seul auteur de son époque à l’employer. Cette seconde surprise incite à poursuivre l’enquête et à s’intéresser précisément aux différentes occurrences et à leur contexte. Or il apparaît rapidement que, d’une part, le mot aeternitas est relativement fréquent puisqu’il est utilisé à quarante-huit reprises par Cicéron et que, d’autre part, ses emplois sont concentrés dans les ouvrages philosophiques. Hormis trois mentions dans les discours[3] et trois dans les traités consacrés à la rhétorique[4], la plupart des occurrences, à savoir trente-sept, figurent en effet dans les traités philosophiques[5] et dans la traduction cicéronienne du Timée[6].

Ces remarques d’ordre statistique suscitent un certain nombre de questions, qui renvoient, d’une part, à la conception cicéronienne du temps et, d’autre part, au transfert à Rome des concepts grecs de temps : Cicéron est-il l’inventeur du terme aeternitas ? Celui-ci est-il calqué sur un terme grec, et si oui lequel ? Pourquoi a-t-il créé, ou du moins privilégié, ce terme ?

Pour tenter d’apporter une réponse à ces questions, nous étudierons d’abord le contexte de la première occurrence, avant de faire appel aux données étymologiques qui permettront de préciser le sens du vocable latin, notamment par rapport aux notions grecques de temps.

1. Apparition du substantif aeternitas

Si l’on se fie au témoignage de la Bibliotheca Teubneriana Latina, c’est dans le De inuentione que le substantif aeternitas fait sa première apparition dans la littérature latine.

1.1. Temps et éternité dans la définition du De inuentione

Dans cette œuvre de jeunesse[7], sans doute composée autour des années 84-83[8], Cicéron use du mot aeternitas dans le cadre d’une définition du temps – par ailleurs la seule que l’on trouve dans toute son œuvre conservée (Cic., Inv. 1, 39[Cic.Inu.1,39])[9] :

Tempus autem est – id quo nunc utimur, nam ipsum quidem generaliter definire difficile est – pars quaedam aeternitatis cum alicuius annui, menstrui, diurni, nocturniue spatii certa significatione.

Le temps – celui dont nous parlons maintenant, car il est difficile à définir en lui-même d’une façon générale – est une partie de l’éternité, comportant une indication précise de durée : année, mois, jour ou nuit.

Le contexte rhétorique et la forme taxinomique de cet acte de naissance officiel méritent quelques commentaires. Distinguant les différentes parties du discours, Cicéron présente la confirmatio[10]et les sources de l’argumentation dont elle est constituée. C’est parmi les loci argumentationum quefigure le temps, qui intervient à côté du lieu, de la manière, de l’occasion et de la possibilité, au titre d’attribut circonstanciel de l’action[11]. Selon la méthode formulée à propos des controverses portant sur la dénomination[12], Cicéron prend soin de définir les termes qui désignent les différentes espèces de circonstances au moyen d’une explication « courte, claire et conforme à l’opinion courante »[13]. Aussi envisage-t-il le temps dans une perspective fonctionnelle (cfid quo nunc utimur) en récusant d’emblée toute définition générale (cfgeneraliter). Évacuant la question conceptuelle au prétexte de sa difficulté, il circonscrit son propos à l’éloquence.

Cependant, cette précaution oratoire, qui renvoie à la problématique philosophique du temps[14], ne signifie pas que Cicéron renonce à son objectif théorique. Elle marque la volonté de ne pas s’éloigner de la signification courante : lorsque l’orateur mentionne le temps, il doit le faire en tenant compte de l’opinion commune. La même exigence se trouve imposée au théoricien de l’éloquence, qui se doit d’harmoniser sa terminologie avec l’usage. C’est pourquoi la définition du temps proposée par Cicéron est, conformément à l’opposition mise en évidence par É. Gavoille, « une définition descriptive à portée pratique, qui consiste à rappeler l’usage d’un mot » et non « une définition prescriptive ou constructive, qui vise à dégager le concept de la chose »[15]. Cependant, si l’on se réfère à l’opposition, que Cicéron établira lui-même dans le De oratore, entre la pratique définitoire des orateurs et celle des savants, il apparaît que la méthode utilisée pour le temps se trouve à mi-chemin entre les deux (Cic., de Or. 2, 108-109[Cic.deOr.2,108-109])[16] :

Alia est enim, cum inter doctos homines de his ipsis rebus quae uersantur in artibus disputatur, uerborum definitio, ut quom quaeritur quid sit ars, quid sit lex, quid sit ciuitas. In quibus hoc praecipit ratio et doctrina, ut uis eius rei quam definias sic exprimatur, ut neque absit quicquam neque supersit. Quod quidem in illa causa neque Suplicius fecit neque ego conatus ; nam quantum uterque nostrum potuit, omni copia dicendi dilatauit, quid esset maiestatem minuere.

Nous n’avons pas besoin entre nous de définitions comme celles qu’emploient les savants, lorsqu’ils disputent sur des objets de spéculation théorique et qu’ils recherchent ce qu’est un art ou une loi ou un État ; la méthode scientifique exige alors que le sens du mot à définir soit exactement exprimé, sans qu’on dise trop ni trop peu. Mais dans la cause dont je parle, Sulpicius ne fit point de définition semblable, et je ne songeai pas plus que lui à en faire. Au contraire, nous nous efforçâmes l’un et l’autre de développer avec toutes les ressources de l’amplification le contenu de ces mots : porter atteinte à la majesté du peuple.

Les docti traquent les res derrière les uerba et s’efforcent d’élaborer des concepts. Quant aux orateurs, ils se méfient des définitions et préfèrent développer à partir de l’usage commun les éléments qui conviennent à leur cause[17]. La définition est non seulement peu efficace pour persuader les juges (in sensum et in mentem iudiciis intrare non potest), mais elle est en outre dangereuse car l’adversaire peut détourner les mots à son profit[18]. La problématique est différente dans les ouvrages théoriques sur l’éloquence : il s’agit de donner une définition à la fois complète et concise (ut neque absit quicquam neque supersit) sur laquelle puisse se fonder l’orateur pour mettre en œuvre la copia dicendi en conformité avec l’usage commun.

Cette exigence apparaît dans la définition du temps, qui est envisagé comme une fraction de durée, déterminée en fonction des divisions naturelles. Les points de repère choisis – année, mois, jour, nuit – correspondent aux périodes du temps astronomique et renvoient par conséquent à l’expérience commune.

1.2. L’interprétation de Marius Victorinus

La référence sous-jacente au temps céleste comme fondement du temps humain a été soulignée de longue date par le rhéteur Marius Victorinus dans son commentaire In rhetoricam Ciceronis. À propos dela définition cicéronienne du temps, le commentateur note en effet (Mar. Vict., In. Cic. Rhet. 1, 26[Mar.Vict.In.Lib.1,26])[19] :

Ex cursu enim siderum certis temporibus certum nomen impositum est. […] Singularum autem cursus habet tempus suum, sed omne tempus certis uocabulis non tenetur. Nam Saturni cursus habet tempus, sed tempus ipsum non habet nomen : item Iouis, Martis, Veneris atque Mercurii. Solis uero cursus cum se expleuerit, annus est : Lunae cum se expleuerit, mensis est. Iam uero ex Sole supra terras posito diem uocabimus, ex Sole sub terris posito noctem uocabimus.

On a en effet attribué un nom déterminé à des temps déterminés en fonction du cours des astres. […] Or le cours de chacun d’eux comporte son propre temps, mais tous les temps ne sont pas désignés par des termes déterminés : en effet, le cours de Saturne comporte son propre temps, mais ce temps n’a pas de nom : il en est de même pour Jupiter, Mars, Vénus et Mercure. En revanche, lorsque le Soleil a achevé son cours, c’est une année : lorsque la Lune a achevé le sien, c’est un mois. De plus, à partir du moment où le Soleil se trouve au-dessus des terres, nous parlerons de jour, à partir du moment où il se trouve au-dessous, nous parlerons de nuit.[20]

La glose de Victorinus suggère que Cicéron se réfère délibérément aux marqueurs naturels du temps parce qu’ils constituent la base de l’expérience commune et pourront aisément être utilisés par l’orateur. Or cette référence aux divisions temporelles fondées sur le cours des astres induit une conception durative et spatiale du temps. Cet aspect est fortement marqué dans la définition du De inuentione et apparaît notamment dans les substantifs pars et spatium. Là encore, le commentaire de Victorinus se révèle très précieux en ce qu’il explicite le lien entre temps, espace et durée (Mar. Vict., In. Cic. Rhet. 1, 26[Mar.Vict.In.Lib.1,26])[21] :

Quod tempus, id est, hoc quo nunc utimur, spatium accipiamus, quod aut in multis annis sit aut in anno aut in mensibus aut in mense aut in diebus uel die aut in noctibus uel nocte aut in horis uel hora uel momento.

Il faut comprendre le mot temps, je veux dire celui dont nous parlons maintenant, dans le sens d’espace de durée, parce qu’il consiste soit en une ou plusieurs années, soit en un ou plusieurs mois, soit en un ou plusieurs jours, soit en une ou plusieurs nuits, soit en une ou plusieurs heures ou un moment.[22]

La notion d’espace de durée importe beaucoup à l’orateur car il devra mettre en rapport l’action et le temps afin par exemple de montrer que son client ne disposait pas du délai nécessaire pour accomplir le crime dont on l’accuse[23]. À cet égard, la différence par rapport à la Rhétorique à Herennius est significative. L’auctor y distingue en effet beaucoup plus clairement que ne le fait Cicéron tempus et spatium : tempus désigne le moment où se sont produits les faits, tandis que spatium indique la durée nécessaire à la réalisation de l’acte[24]. En revanche, conformément au raisonnement explicité par Victorinus, Cicéron, lorsqu’il fait référence à la notion de durée, emploie indifféremment spatium et tempus[25]. Cette confusion lexicale confirme l’assimilation du temps à la durée, qui était déjà suggérée par la définition[26]. Le temps de l’orateur est une fraction de durée, dont il s’agit de prendre en compte les effets sur l’auditoire[27]. Les divisions du temps jouent notamment un rôle important car l’orateur ne traitera pas de la même manière les faits qui relèvent d’un lointain passé et ceux qui viennent de se produire. De même, l’éloignement temporel des faits ou l’âge des témoins et des acteurs sont déterminants dans l’argumentation car ils peuvent contribuer à l’auctoritas d’une chose ou d’une personne[28].

Compte tenu de ce contexte définitoire marqué par la référence au temps vécu, l’emploi du terme aeternitas est fort surprenant. Cicéron recourt en effet à la méthode, dite synthétique ou relationnelle[29], dans le sens où il décrit le temps par rapport à la notion d’éternité. C’est pourquoi, il paraît pour le moins curieux de définir une réalité d’expérience telle que le temps au moyen d’un néologisme – ou du moins d’un mot très rare –, qui risque de produire une confusion plutôt qu’un éclaircissement du sens. Cicéron avait en effet d’autres termes à sa disposition tels aeuum, aetas, longinquitas, qu’il utilise du reste dans le même passage[30]. On peut bien entendu alléguer, comme le fera l’orateur lui-même en évoquant ces incohata ac rudia, son jeune âge et son inexpérience[31]. Mais le fait que ce terme apparaisse pour la première fois dans le De inuentione et qu’il revienne ensuite très fréquemment dans les traités philosophiques invite à pousser plus loin la réflexion pour tenter d’expliquer son emploi.

2. Origine et signification du substantif aeternitas

Si l’étymologie d’aeternitas ne fait pas vraiment difficulté, l’hypothèse d’une création lexicale cicéronienne reste sujette à caution. Cependant, au-delà de ce point précis, dont l’intérêt est avant tout anecdotique, la question est de savoir pourquoi Cicéron a opté pour le terme aeternitas et quel sens exact il lui attribue. L’histoire du terme permettra peut-être d’apporter quelques pièces au dossier.

2.1. Données étymologiques

Selon A. Ernout et A. Meillet[32], l’adjectif aeuiternus[33], qui a donné la forme réduite aeternus, est, comme aetas, à rapprocher de aeuum. Ce substantif dérive lui-même d’une forme indo-européenne *ayu, *yu-marquant la durée ou la force vitale et qui apparaît en particulier dans le grec αἰών[34]. Les adjectifs latins ne dériveraient pas directement d’aeuum, mais d’une forme adverbiale de type *aiwi, attestée par l’éolo-achéen. Quant à la finale en -ternus, a, um, elle est à rapprocher des séquences-[t]ernus, -[t]urnus et -[t]inus, qui sont très fréquentes dans les adjectifs liés à l’expression du temps, comme uernus, hibernus, nocturnus, hodiernus. Selon C. Kircher-Durand, les adjectifs aeternus et sempiternus furent créés par dérivation au moyen de la séquence -ternus, « extraite par mécoupure d’adjectifs comme hesternus »[35]. Quant au substantif aeternitas, il se présente comme un dérivé de l’adjectif aeternus. La question est de savoir s’il s’agit d’une dérivation ancienne ou datant de l’époque cicéronienne. On a certes remarqué de longue date la prolifération à l’époque classique des abstraits en -tas et autres suffixes -itia, -tio, -tio[36]et J. Daude précise que « le suffixe -tas est le mieux attesté des suffixes générateurs d’abstraits de qualité, le plus vivant à date historique, c’est-à-dire le plus utilisé pour la création de néologismes »[37]. Le succès de ce suffixe s’explique par le caractère de neutralité qu’il a acquis à l’époque historique, où il n’est plus « qu’un pur et simple convertisseur d’adjectif de qualité en substantif »[38]. Cependant, il n’en a pas toujours été ainsi et le suffixe -tas caractérisait initialement une qualité attribuée à un objet de manière extrinsèque et permanente[39]. Cette valeur apparaît dans les dérivés attestés au début du iie siècle parmi lesquels figurent, outre des notions générales liées à la cité romaine, des notions d’espace ou de temps comme aetas, aeuitas ou antiquitas[40]. La formation et le sémantisme d’aeternitas, formé sur le modèle d’aeuitas, paraissent donc sans surprise.

2.2. Un néologisme cicéronien ?

Les données étymologiques apportent un premier élément de réponse concernant l’hypothèse d’une création lexicale cicéronienne : compte tenu du fait que l’adjectif aeternus est fréquemment attesté dès le iie siècle, notamment chez Ennius[41], Pacuvius[42], Accius[43], Plaute[44]et Térence[45], il est peu probable que le dérivé aeternitas, sans doute nettement antérieur à la composition du De inuentione, soit un néologisme cicéronien.

Cependant, à l’appui de l’hypothèse opposée, on pourrait mentionner, d’une part, la richesse de la création lexicale cicéronienne et, d’autre part, la fréquence relative du terme chez notre auteur :
– Il n’est en effet pas exclu que Cicéron ait utilisé dans le De inuentione un procédé lexical auquel il recourra également dans ses écrits postérieurs. Se limitant aux équivalences terminologiques explicitement formulées, C. Nicolas a montré que la création lexicale par traduction était fréquente dans les traités cicéroniens[46]. Si l’on s’en tient au suffixe -tas, l’auteur mentionne notamment les néologismes aequilibritas (Cic., Nat. 1, 109)[Cic.Nat.1,109], medietas (Cic., Tim. 23)[Cic.Tim.23], opportunitas (Cic., Fin. 3, 45)[Cic.Fin.3,45], perspicuitas (Cic., Luc. 17)[Cic.Luc.17] et qualitas (Cic. Ac. 1, 24)[Cic.Ac.1,24] respectivement calqués sur ἰσονομία, μεσότης, εὐκαιρία, ἐνάργεια et ποιότης.
– De plus, les occurrences d’aeternitas semblent renforcer l’hypothèse d’un néologisme cicéronien. À l’époque républicaine en effet, le terme apparaît presque uniquement chez Cicéron, et en particulier dans trois traités : le De Fato (12 occurrences),les Tusculanes (9) etle De natura deorum (8)[47]. Ce n’est qu’à partir du principat qu’il sera plus couramment employé, notamment par Vitruve[48], Sénèque[49], Pline l’Ancien[50], Pline le Jeune[51] et Tacite[52]. Diffusé grâce aux traités cicéroniens, aeternitas était naturellement passé dans l’usage.

Pourtant, l’hypothèse d’une création lexicale cicéronienne ne peut être confirmée, dans la mesure où l’existence prélable du terme reste possible. Son absence chez les auteurs antérieurs à Cicéron ne constitue pas une preuve formelle puisque, pour des raisons d’incompatibilité métrique, aeternitas, qui comporte un crétique, ne pouvait figurer dans la poésie dactylique. Cela permet notamment d’expliquer pourquoi le substantif ne figure pas dans le De rerum natura de Lucrèce, alors que l’adjectif aeternus y est très fréquent[53]. Mais inversement l’argument dactylique ne saurait être déterminant non plus car il ne porte pas sur le genre dramatique : les substantifs immortalitas, attestés chez Plaute et Térence[54], ou grandaeuitas, attesté chez Accius et Pacuvius[55], constituent de parfaits contre-exemples.

Pour clore cette discussion, il est nécessaire de prendre en compte les pratiques habituelles de Cicéron. Or, comme l’indique J. G. F. Powell, le philosophe ne manque pas de justifier ses créations lexicales ni d’expliquer leur signification à la première occurrence[56]. Il prend soin de préciser la plupart du temps les notions grecques qui correspondent aux différents néologismes[57]. Il marque en outre son hésitation à introduire des termes, dont la nouveauté risquerait de heurter ses lecteurs ou de provoquer l’incompréhension[58]. Ainsi évoque-t-il dans le De natura deorum la félicité des dieux épicuriens au moyen d’un double néologisme teinté d’ironie (Cic., Nat. 1, 95[Cic.Nat.1,95])[59] :

[…] ista siue beatitas siue beatitudo dicendast – utrumque omnino durum, sed usu mollienda nobis uerba sunt –, […].

[…] votre beatitas [félicité] ou beatitudo [béatitude], comme on voudra – les deux mots sont rébarbatifs, mais il faut les adoucir par l’usage –, […].

Bien que le rapport au modèle grec ne soit pas explicite, on peut supposer que Cicéron, recourant au procédé du calque, a formé ces termes latins sur modèle du grec μακαριότης, utilisé par Épicure pour désigner la béatitude divine[60]. La signification des substantifs ne semble faire aucunement difficulté. En revanche, la rudesse supposée du néologisme permet de souligner les réticences de Cicéron à l’égard de la uoluptas épicurienne. L’attention portée aux données lexicales et les précautions qui accompagnent l’emploi de néologismes dans les traités philosophiques laissent donc peu de doutes quant au cas d’aeternitas : il est hautement improbable que Cicéron ait eu recours à un néologisme sans en préciser le sens, et, qui plus est, dans un contexte définitionnel visant à la simplification d’une notion complexe.

Cependant, in fine, la fréquence du terme dans l’œuvre de Cicéron au regard de sa rareté chez les autres auteurs de l’époque républicaine demeure un élément significatif. Même si Cicéron n’est pas le créateur du substantif aeternitas, il lui a néanmoins donné une place importante dans son œuvre philosophique. Il convient donc de s’interroger sur les raisons de ce choix : pourquoi Cicéron a-t-il privilégié le substantif aeternitas quand il avait à sa disposition d’autres termes comme aetas et aeuum, qui étaient davantage consacrés par l’usage ? Cette réflexion devrait permettre de déterminer plus précisément le sens et la valeur de l’aeternitas cicéronienne.

2.3. Pourquoi aeternitas ?

Il semble que le terme le plus évident pour évoquer la notion de durée ait été aeuum. Si les Anciens ont tardé à établir un rapport d’ordre étymologique entre αἰών et aeuum, ils étaient fort conscients des liens sémantiques entre les deux termes. Le témoignage de Varron est à cet égard significatif (Varron, LL. 6, 11[Varron,L.6,11])[61] :

Aeuum ab aetate omnium annorum ; hinc aeuiternum, quod factum est aeternum ; quod Graeci αἰῶνα,id ait Chrysippus esse<>ε<> ὄν.

L’éternité [aeuum] provient de la durée [aetas] de toutes les années ; de là aeuiternus qui est devenu aeternus [éternel] ; les Grecs l’appellent αἰών [éternité], dont Chrysippe dit que c’est ἀεὶ ὄν [étant toujours].

Il apparaît que Varron ne mentionne aeternitas ni dans cette définition ni dans l’ensemble de livre VI, consacré aux notions de temps : c’est aux substantifs aeuum et aetas qu’il recourt pour traduire la notion de durée illimitée. Cet état de fait est probablement lié à une question d’ordre morphologique. Du point de vue de sa formation, le substantif latin aeternitas, qui est un dérivé de dérivé, ne correspond pas au grec αἰών, mais à αἰωνιότης, dérivé tardif de αἰώνιος[62]. Cette différence de formation comporte d’importantes conséquences d’ordre sémantique, dans la mesure où les dérivations successives confèrent au mot latin un coefficient d’abstraction élevé. Si aeuum fait référence au temps vécu, le dérivé aeternitas désignera la qualité de ce qui est aeternus, c’est-à-dire le fait d’avoir une durée sans rapport ni avec la vie humaine ni avec les divisions temporelles. En ce sens, les dérivations successives d’aeuum peuvent servir d’illustration à l’évolution sémantique dont témoigne l’histoire de son équivalent grec. A. Festugière[63] a en effet montré comment, sous l’impulsion de la réflexion philosophique, le terme αἰών, qui désignait d’abord la durée de vie limitée impartie à chaque être vivant, acquit le sens de durée illimitée lorsqu’il fut appliqué au monde, avant d’exprimer la notion d’éternité dans l’œuvre de Platon[64].

Or l’évolution qui a affecté le sémantisme d’αἰών peut contribuer à expliquer le choix de Cicéron en faveur d’aeternitas au détriment d’aeuum ou d’aetas. Ces deux substantifs renvoient en effet à des réalités d’expérience et sont étroitement en rapport avec la durée de la vie humaine. Néanmoins, à la différence d’aetas, aeuum ne paraît pas avoir été très fréquemment employé avant Cicéron, puisqu’on n’en relève que cinq occurrences, notamment chez Ennius et Pacuvius[65]. Cicéron lui-même ne semble guère affectionner ce terme, qui ne figure que quatre fois dans l’ensemble de son œuvre. De plus, il est significatif que, sur ce total déjà si peu élevé, trois occurrences ne soient pas attribuables à Cicéron lui-même puisqu’elles figurent dans des citations de poètes[66]. En outre, il s’agit dans tous les cas d’expressions du type aeuom degere ou agere, qui renvoient explicitement à la durée de la vie humaine.

 

En conclusion, il apparaît que la fréquence du substantif aeternitas chez Cicéron, qui n’en est probablement pas le créateur, mais a joué un rôle prépondérant dans sa généralisation, est liée au discrédit d’aeuum. Le philosophe a généralement évité ce dernier terme en raison de sa connotation à la fois archaïque et poétique. Cela cadrerait tout à fait avec le purisme littéraire qui était alors de rigueur. Cependant s’ajoutent des motifs sémantiques. Dans son sens courant, aeuum renvoyait en effet à la fraction de temps impartie à la vie humaine. Par conséquent, il ne pouvait convenir pour exprimer l’extension infinie de la durée. Quant à aetas, qui était d’un usage extrêmement fréquent dès le iie siècle[67], Cicéron l’utilisa en lieu et place d’aeuum pour désigner la durée et les âges de la vie ainsi que les différentes époques de l’histoire humaine. D’où le grand nombre de ses occurrences (508) dans son œuvre. Ainsi, dans les Tusculanes sur un total de vingt-trois occurrences, aetas renvoie-t-il trois fois à l’âge[68], six fois à une époque déterminée[69] et quatorze fois à la vie humaine[70].

Il semble donc que l’utilisation d’aeternitas par Cicéron implique une aspiration vers l’abstraction et la volonté de distinguer nettement la notion générale de temps de l’expérience humaine. Désireux de donner une définition concise du temps humain qui corresponde à l’usage courant et soit utilisable par l’orateur, Cicéron le distingue du tempus generale, qu’il désigne par le néologisme aeternitas. Mais ce faisant, il établit une identification pour le moins problématique, qui renvoie à la question des rapports entre αἰών et χρόνος dans la tradition philosophique.



[1] Les pages qui suivent doivent beaucoup à J.-F. Thomas. Qu’il veuille bien trouver ici l’expression de ma gratitude pour ses précieuses suggestions.

[2] Voir Ernout A. et Meillet A., Dictionnaire étymologique de la langue latine. Histoire des mots, Paris, Klincksieck, 1959, 4e édition, p. 13-14.

[3] Voir Cic., Pis. 7 ; Cic., Marc. 28 et Cic., Phil. 14, 34[Cic.Pis.7][CicMarc.28][Cic. Phil.14,34].

[4] Voir Cic., Inv. 1, 26 ; Cic., de Or. 3, 20 et Cic., Top. 59[Cic.Inu.1,26][Cic.deOr.3,20][Cic.Top.59].

[5] Voir Cic., Fin. 2, 88 ; 89 ; Cic., Tusc. 1, 38 ; 50 ; 55 ; 80 ; 81 ; 94 ; 4, 37 ; 5, 70 ; Cic., Nat. 1, 21 ; 114 ; 2, 43 ; 51 ; 54 ; 62 ; 95 ; 3, 14 ; Cic., Div. 1, 25 ; 115 ; 125 ; 2, 19 ; Cic., Fat. 19 ; 21 ; 27 ; 29 ; 32 ; 33 ; 37 ; 38, frag. 2 dans Serv. En. 3, 376 ; Cic., CM 77[Cic.Fin.2,88,89][Cic.Tusc.1,38][Cic.Tusc.1,50][Cic.Tusc.1,55][Cic.Tusc.1,80][Cic.Tusc.1,81][Cic.Tusc.1,94][Cic.Tusc.4,37][Cic.Tusc.5,70][Cic.Nat.1,21][Cic.Nat.1,114][Cic.Nat.2,43][Cic.Nat.2,51][Cic.Nat.2,54][Cic.Nat.2,62][Cic.Nat.2,95][Cic.Nat.3,14][Cic.Diu.1,25][Cic.Diu.1,115][Cic.Diu.1,125][Cic.Diu.2,19][Cic.Fat.19][Cic.Fat.21][Cic.Fat.27][Cic.Fat.29][Cic.Fat.32][Cic.Fat.33][Cic.Fat.37][Cic.Fat.38][Seru.En.3,376][Cic.CM77].

[6] Voir Cic., Tim. 6 ; 7 ; 8 ; 34[Cic.Tim.6][Cic.Tim.7][Cic.Tim.8][Cic.Tim.34].

[7] Voir Cic., de Or. 1, 5[Cic.deOr.1,5].

[8] Sur les problèmes liés à la datation du De inuentione, voir l’introduction de G. Achard, Cicéron, De l’invention, Paris, CUF, 2002, p. 5-10.

[9] Traduction G. Achard.

[10] Voir Cic., Inv. 1, 34[Cic.Inu.1,34]. Les différentes parties du discours à savoir exordium, narratio, partitio et confirmatio ont été distinguées en I, 19.

[11] Voir Cic., Inv. 1, 38[Cic.Inu.1,38] : in gestione negotii.

[12] Voir Cic., Inv. 1, 10-11[Cic.Inu.1,10-11]. Parmi les différents états de la cause, Cicéron distingue l’état conjectural, qui désigne une controverse sur le fait, l’état de définition, qui désigne une controverse sur une dénomination, l’état de qualification, qui désigne une controverse sur la nature et la qualité de l’affaire, l’état déclinatoire lorsque la controverse porte sur les conditions du procès. Concernant la dénomination, Cicéron donne les précisions suivantes : Nominis est controuersia, cum de facto conuenit et quaeritur id quod factum est quo nomine appelletur (1, 11).

[13] Voir Cic., Inv. 2, 53[Cic.Inu.2,53] : Primus ergo accusatoris locus est eius nominis cuius de ui quaeritur breuis et aperta et ex opinione hominum definitio […] ; Cic., Inv. 2, 55[Cic.Inu.2,55]. Ces principes de méthode seront repris dans Cic., de Or. 1, 189[Cic.deOr.1,189] : omniaque, quae sunt uel generum uel partium nomina, definitionibus quam uim habeant est exprimendum. Est enim definitio rerum earum, quae sunt eius rei propriae quam definire uolumus, breuis et circumscripta quaedam explicatio. Sur la pratique de la définition chez Cicéron, voir Gavoille É. , « Sens et définition chez Cicéron », in Lingua Latina. Conceptions latines du sens et de la définition, Paris, PUPS, 1999, p. 81-95.

[14] Épicure (Her. 72-73) avait déjà souligné les difficultés liées à la définition du temps[Epic.Her.72-73], qui n’est pas un concept, mais une évidence. Il avait également mis en garde les philosophes qui en cherchant à définir le temps se contentent de substituer au mot d’autres termes comme meilleurs. Sur cette question, cf. Luciani S., L’éclair immobile dans la plaine, philosophie et poétique du temps chez Lucrèce, Paris, Peeters, Bibliothèque d’Études Classiques 21, 2000, p. 102-105.

[15] Voir Gavoille E., « Sens et définition chez Cicéron », art. cité, p. 84.

[16] Traduction E. Courbaud, Paris, CUF, 1928.

[17] Voir Cic., Inv. 2, 53[Cic.Inu.2,53] : Hoc sic breuiter expositum pluribus uerbis est et rationibus confirmandum et ita esse ut descripseris ostendendum.

[18] Voir Cic., de Or. 2, 109[Cic.deOr.2,109] : Etenim definitio primum, reprehenso uerbo uno aut addito aut dempto, saepe extorquetur e manibus […].

[19] Voir « Q. Fabii Laurenti Victorini explanationum in Rhetoricam M. Tullii Ciceronis Libri duo » dans Halm C., Rhetores Latini Minores, Leipzig, 1863, p. 223. Sur ce rhéteur du ive siècle, converti au christianisme, cf. Hadot P., Marius Victorinus. Recherches sur sa vie et ses œuvres, Paris, Études augustiniennes, 1971 et Herzog R. (éd.), Nouvelle histoire de la littérature latine, t. V, Restauration et renouveau, Paris, Brépols, 1993, p. 390-404.

[20] Traduction personnelle.

[21] Voir Halm C., Rhetores Latini Minores, op. cit., p. 223-224.

[22] Traduction personnelle.

[23] Voir Cic., Inv. 1, 39 ; Cic., Inv. 2, 40[Cic.Inu.1,39][Cic.Inu.2,40].

[24]VoirHer.2, 7[Her.2,7] : Tempus ita quaeritur : quid anni, qua hora, noctu an interdiu, et qua die, qua noctis hora factum esse dicatur […] Saptium ita considerabitur : satisne longum fuerit ad eam rem transigendam, […]. La différence de perspective entre les deux passages n’explique qu’en partie cet écart. Ce développement sur le temps figure dans la section consacrée aux indices (signa), elle-même insérée dans les préceptes concernant le genre judiciaire. Le propos de Cicéron est plus abstrait puisqu’il présente les loci argumentationum. Cependant, cette visée générale n’excluait pas une distinction nette entre le moment et la durée.

[25] Voir Cic., Inv. 1, 39[Cic.Inu.1,39] : Nam saepe oportet commetiri cum tempore negotium et uidere potueritne aut magnitudo negotii aut multitudo rerum in eo transigi tempore.

[26] Cette insistance sur la durée pourrait dans une certaine mesure être rapprochée de la spatialisation du temps qui s’opère dans la rhétorique. Sur ce point, cf. Cassin B., L’effet sophistique, Paris, Gallimard, 1995, p. 412-413. L’auteur, évoquant l’invention philosophique de la rhétorique et l’assimilation platonicienne de la sophistique à la rhétorique (Plat., Gorg. 449a [Plat.Gorg.449a]), en formule la conséquence suivante : « La rhétorique est l’invention de l’ontologie pour domestiquer – spatialiser – le temps par le discours. Par et dans la rhétorique, le temps prend pour modèle et se trouve réduit à l’espace ; un discours est d’abord un organisme qui s’étale (il a un « plan ») et s’articule (il faut, dit Platon, savoir le « découper »). »

[27] Voir Greco M., M. T. Cicerone. De inuentione, Introduzione, traduzione e note, Lecce, Mario Congedo, 1998, p. 187, note 68.

[28] Voir Cic., Top. 1, 73[Cic.Top.1,73].

[29] Sur cette typologie, voir Robinson R., Définitions, Oxford, Clarendon Press, 1950.

[30] Voir Cic., Inv. 1, 39[Cic.Inu.1,39] : Et item communiter in tempore perspiciundo longinquitas eius est consideranda.

[31] Voir Cic., de Or. 1, 5[Cic.deOr.1,5].

[32] Voir Dictionnaire étymologique de la langue latine, op. cit., p. 13-14.

[33] L’adjectif aeuiternus est attesté chez Varron (Men. 437[Var.Men.437]) et chez Apulée (Socr. 3[Apul.Socr.3]).

[34] Sur le sens initial du mot αἰών, voir Benvéniste E., « Expression indo-européenne de l’Éternité », Bulletin de la société linguistique de Paris, 38, 1937, p. 103-112 ; Philippson P., « Il concetto greco di tempo nelle parole aion, chronos, kairos e eniautos », Rivista di storia della filosofia, 4, 1949, p. 81-97 ; Degani E., Aiôn da Omero ad Aristotele, Padoue, CEDAM, 1961 ; Festugière A., « Le sens philosophique du mot aiôn », in Études de philosophie grecque, Paris, Vrin, 1971, p. 254-271 ; Onians R. B., The Origins of European Thought about the Body, the Mind, the Soul, the World, Time and Fate, Cambridge, Cambridgez University Press, 1951 ; traduction française par Cassin B., Debru A. et Narcy M., Les origines de la pensée européenne sur le corps, l’esprit, l’âme, le monde, le temps et le destin, Paris, Seuil, 1999, p. 245-277 ; Keiser H.-M., Life-Time-Entirety : a study of ΑΙΩΝ in Greek Litterature and Philosophy, thèse, Amsterdam, 1999.

[35] Voir Kircher-Durand C., « Les dérivés en –nus, –na, –num », in Kircher-Durand C. (éd.), Grammaire fondamentale du latin, Paris, Peeters, t. IX, 2002, p. 144-146.

[36] Voir Marouzeau J., « Patrii sermonis egestas », 45, Eranos, 1947, p. 22-24 ; André J., Emprunts et suffixes nominaux en latin, Paris-Genève, Droz, 1971, p. 130-132

[37] Voir Daude J, « Abstraits de qualité », in Kircher-Durand C. (éd.), Grammaire fondamentale du latin, Paris, Peeters, t. IX, 2002, p. 246.

[38] Ibid., p. 250.

[39] Cette valeur essentielle et distinctive de –tas par rapport aux autres suffixes a été rappelée par J. Dangel dans une étude consacrée aux emplois et à la valeur du suffixe -tudo chez Accius, cf. Dangel J., « Les mots suffixés en -tudo chez Accius : étude stylistico-linguistique », in Lavancy M. et Longrée D. (éd.), Actes du Ve colloque de linguistique latine, Louvain-La-Neuve, 1989, CILL 15. 1-4 (1989), p. 91-102.

[40] Voir Daude J., ibid., p. 252.

[41] Voir Enn., An. 1, 106[Enn.An.1,106].

[42] Voir Pacuv., Tr. 295 Ribbeck[Pacuu.Tr.295Ribbeck].

[43] Voir Acc., frg. 709-710 Dangel[Acc.709-710Dangel] (= Ribbeck, Acc. 670) : in domum aeternam patris.

[44] Voir Plaut., Cap. 778 et 897 ; Plaut., Most. 194[Pl.Cap.778][Pl.Cap.897][Pl.Most.194].

[45] Voir Ter., Eun. 872[Ter.Eun.872].

[46] Voir Nicolas C., « La néologie technique par traduction chez Cicéron et la notion de “verbumexverbalité” », in Fruyt M. et Nicolas C. (éd.), La création lexicale en latin, Paris, PUPS, 2000, p. 109-149.

[47] Voir Cic., Fat. 19 ; 21 ; 27 ; 29 ; 32 ; 33 ; 37 ; 38, frag. 2 dans Serv. En. 3, 376 ; Cic., Tusc. 1, 38 ; 50 ; 55 ; 80 ; 81 ; 94 ; 4, 37 ; 5, 70 ; Cic., Nat. 1, 21 ; 114 ; 2, 43 ; 51 ; 54 ; 62 ; 95 ; 3, 14[Cic.Fat.19][Cic.Fat.21][Cic.Fat.27][Cic.Fat.29][Cic.Fat.32][Cic.Fat.33][Cic.Fat.37][Cic.Fat.38][Seru.En.3,376][Cic.Tusc.1,38][Cic.Tusc.1,50][Cic.Tusc.1,55][Cic.Tusc.1,80][Cic.Tusc.1,81][Cic.Tusc.1,94][Cic.Tusc.4,37][Cic.Tusc.5,70][Cic.Nat.1,21][Cic.Nat.1,114][Cic.Nat.2,43][Cic.Nat.2,51][Cic.Nat.2,54][Cic.Nat.2,62][Cic.Nat.2,95][Cic.Nat.3,14].

[48] Voir Vitr., 1, 8 ; 2, 5 ; 8 ; 10 ; 13[Vitr.1,8][Vitr.2,5][Vitr.2,8][Vitr.2,10][Vitr.2,13].

[49] Voir Sen., Helv. 20, 2 ; Sen., Tranq. 14, 10 ; Sen., Brev. 15, 4 ; Sen., Ep. 102, 1 ; 102, 29 ; 107, 8 ; 117, 6[Sen.Helu.20,2][Sen.Tranq.14,10][Sen.Breu.15,4][Sen.Ep.102,1][Sen.Ep.102,29][Sen.Ep.107,8][Sen. Ep.117,6.].

[50] Voir Plin., 2, 27 ; 13, 53 ; 16, 217 ; 17, 129 ; 25, 106 ; 26, 114[Plin.2,27][Plin.13,53][Plin.16,217][Plin.17,129][Plin.25,106][Plin.26,114].

[51] Plin., Ep. 3, 16, 6 ; 3, 21, 6 ; 5, 8, 1 ; 6, 16, 2 ; 9, 3, 1 ; 10, 41, 1 ; 10, 59 ; 10, 83 ; 10, 112, 3 ; Plin., Pan. 67, 3 ; 67, 3 ; 75, 2[Plin.Ep.3,16,6][Plin.Ep.3,21,6][Plin.Ep.5,8,1][Plin.Ep.6,16,2][Plin.Ep.9,3,1][Plin.Ep.10,41,1][Plin.Ep.10,59][Plin.Ep.10,83][Plin.Ep.10,112,3][Plin.Pan.67,3][Plin.Pan.67,3][Plin.Pan.75,2].

[52] Tac., Agr. 46, 4 ; Tac., H. 1, 84, 4 ; Tac., An. 11, 7, 1.[Tac.Agr.46,4][Tac.H.1,84,4][Tac.An.11,7,1]

[53] On relève 47 occurrences d’aeternus dans le De rerum natura, où l’expression aeternum tempus se substitue à aeternitas (Lucr. 1, 578 ; 582 ; 3, 973 ; 3, 1073[Lucr.1,578][Lucr.1,582][Lucr.3,973][Lucr.3,1073]). Sur le sens et la valeur de tempus aeternum dans la philosophie lucrétienne, cf. Luciani S., L’éclair immobile dans la plaine…, op. cit., p. 276-298.

[54] Voir Plaut., Merc. 603 ; Ter., And. 960[Pl.Merc.603][Ter.And.960].

[55] Voir Pacuv., Tr. 162 Ribbeck ; Acc., Tr. 68, 245[Pacuu.Tr.162Ribbeck][Acc.Tr.68][Acc.Tr.245].

[56] Voir Powell J. F. G., « Cicero’s Translation from Greek », in Powell J. F. G. (éd.), Cicero the Philosopher, Oxford, Clarendon Press, 1995, p. 273-300 (voir p. 291).

[57] Voir Cic., Fin. 3, 45 ; Cic., Luc. 17 ; Cic., Acad. 1, 24-25 ; Cic., Tim. 23 ; Cic., Nat. 1, 109[Cic.Fin.3,45][Cic.Luc.17][Cic.Acad.1,24-25][Cic.Tim.23][Cic.Nat.1,109].

[58] Voir Cic., Acad. 1, 41[Cic.Acad.1,41].

[59] Traduction Auvray-Assayas C., Cicéron, La nature des dieux, Paris, Les Belles Lettres (La Roue à Livres), 2002.

[60] Voir Epic., Men. 123[Epic.Men.123].

[61] Traduction Flobert P., Varron, La langue latine, livre VI, Paris, CUF, 1985.

[62] Ce substantif est attesté comme équivalent de perpetuitas dans le Corpus Glossariorum Latinorum, Goetz F. (éd.), Leipzig, 1888-1924.

[63] Voir Festugière A. J., « Le sens philosophique du mot ΑΙΩΝ », art. cité. E. Benvéniste (« Expression indo-européenne de l’Éternité », Bulletin de la société linguistique de Paris, 38, 1937, p. 103-112) a cependant proposé une autre interprétation du sens initial d’αἰών, qui renverrait non à la durée, mais à l’idée de force vitale. R. B. Onians(Les origines de la pensée européenne…, op. cit., p. 245-250) a renforcé cette hypothèse en attribuant à αἰών le sens de fluide vitale et en montrant que la valeur temporelle s’était ajoutée progressivement sous l’effet d’une association avec ἀεὶ. Néanmoins, comme le notent E. Degani (Aiôn da Omero ad Aristotele, op. cit., p. 40-42) et A. Festugière (p. 270-271), il est difficile de dissocier dans l’αἰών homérique les valeurs de force et de durée parce que le terme est étroitement lié à l’idée de vie. D’après le compte rendu fait par R. A. Bitter (Mnemosyne, 6, 2002, p. 237-240), telle semble être aussi la position de H.-M. KeiserdansLife-Time-Entirety : a study of ΑΙΩΝ in Greek Litterature and Philosophy (op. cit.), que je n’ai malheureusement pu consulter.

[64] Voir Plat. Tim. 37D-38C[Plat.Tim.37D-38C].

[65] Voir Enn., An. 1, 115 ; 9, 303 ; Enn., Scaen. 29, 414 ; Pacuv., Tr. 259 ; Plaut., Poen. 1187[Enn.An.1,115][Enn.An.9,303][Enn.Scaen.29][Enn.Scaen.414][Pacuu.Tr.259][Pl.Poen.1187].

[66] Voir Cic., Brut. 58 = Enn., An. 9, 303 ; Cic., Tusc. 1, 28 = Enn., An. 1, 115 et Enn., An. 2, 48 = Pacuv., Tr. 259[Cic.Brut.58][Enn.An.9,303][Cic.Tusc.1,28][Enn.An.1,115][Enn.An.2,48][Pacuu.Tr.259].

[67] 170 occurrences si on se limite à Ennius, Caton, Pacuvius, Accius, Plaute et Térence.

[68] Voir Cic., Tusc. 1, 5 ; 5, 62 ; 5, 94[Cic.Tusc.1,5][Cic.Tusc.5,62][Cic.Tusc.5,94].

[69] Voir Cic., Tusc. 1, 5 ; 4, 3 ; 4, 5 ; 5, 7 ; 5, 8[Cic.Tusc.1,5][Cic.Tusc.4,3][Cic.Tusc.4,5][Cic.Tusc.5,7][Cic.Tusc.5,8].

[70]Voir Cic., Tusc. 1, 76 ; 1, 93 ; 1, 94 ; 2, 38 ; 3, 61 ; 3, 69 ; 5, 5 ; 5, 55 ; 5, 56 ; 5, 71 ; 5, 77 ; 5, 107[Cic.Tusc.1,76][Cic.Tusc.1,93][Cic.Tusc.1,94][Cic.Tusc.2,38][Cic.Tusc.3,61][Cic.Tusc.3,69][Cic.Tusc.5,5][Cic.Tusc.5,55][Cic.Tusc.5,56][Cic.Tusc.5,71][Cic.Tusc.5,77][Cic.Tusc.5,107].

 


 

Citer cet article : Sabine Luciani, « D’αἰών à aeternitas : le transfert de la notion d’éternité chez Cicéron », Interférences Ars Scribendi, numéro 4, mis en ligne le 30 janvier 2008,
http://ars-scribendi.ens-lsh.fr/article.php3?id_article=58&var_affichage=vf

 

 

 

 


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